Jean de la Fontaine aurait pu écrire cette fable en observant notre société contemporaine, son fonctionnement et ses dérives qui, petit à petit, vont nous précipiter dans un possible effondrement général. Car nous nous obstinons à ne pas entendre les sonneries alarmantes des paroles qui circulent, mélange de vociférations infamantes, de propos grossiers, discriminants et violents, mais également d’appels au secours ou à l’apaisement. Nous ne voulons, d’ailleurs, pas plus voir la réalité qui nous entoure, qui nous enserre, qui s’effrite sous nos yeux, sous nos pieds. Nous faisons ainsi l’autruche !
Notre société fait l’autruche, notre classe politique fait l’autruche, les partenaires sociaux font l’autruche et notre administration tentaculaire, qui jadis a été la colonne vertébrale de la France, est en soi une autruche : incapable d’être à l’écoute des citoyens qu’elle a pour mission de servir, incapable de s’adapter au monde environnant, qui lui par contre a le devoir de le faire envers elle, mais dès lors à son propre détriment. Paradoxe d’un peuple acceptant d’être ainsi asservi à son administration, cet état dans l’état, cette entité qui empêche tout le monde d’avancer, d’évoluer et d’espérer, en tout premier lieu les dirigeants politiques eux-mêmes. Car ils peuvent s’agiter, avoir les meilleures idées et les réformes des plus adaptées aux problèmes et questions de notre temps, le filtre administratif, sa force d’inertie, son autisme sidérant annuleront tous leurs efforts. L’administration est une autruche, le seul oiseau qui ne sait pas voler mais qui prétend savoir à quoi ressemble la terre vue du ciel et qui vous l’explique à vous, animaux rampants, savamment maintenus dans cet état afin qu’ils continuent de ramper et surtout de se taire face à elle, face contre terre.
Devant cet état de fait, confrontés à ces gens qui ne voient rien, n’entendent rien mais qui savent tout mieux que tout le monde, ne nous laissons surtout pas anesthésier ! Nous sommes pour beaucoup des albatros capables, nous, de voler, de voir la réalité et la ligne d’horizon qui nous attend si rien ne change profondément. Alors, arrêtons de ramper face aux imbéciles, libérons-nous, envolons-nous, crions, expliquons, dénonçons, démentons, soyons force de propositions, prenons notre destin en main. Ecrivons, instruisons, combattons le mensonge, l’absurdité, l’hermétisme, l’entrisme, le communautarisme en plus de l’inertie qui fait le lit à tous ces glissements qui nous mènent dès à présent aux bords du précipice. Tel est le début du chemin pour que notre société avance dans la bonne direction, celle permettant de pouvoir à nouveau envisager de vivre ensemble, dans le respect, la considération, l’écoute, le dialogue et l’ouverture d’esprit, fondements de notre histoire, de notre civilisation des lumières qu’il s’agit de rallumer, en écho à ces quelques mots de Guillaume Apollinaire : ainsi est-il « grand temps de rallumer les étoiles ».
