Rappelons-nous nos vacances estivales et le plaisir d’aller faire ses courses au marché local : d’un pas tranquille, sans idées préconçues de ce que l’on va acheter, se régalant les yeux et le nez, se laissant convaincre de gouter un produit local inconnu ; parler au vendeur, se faire servir, se laisser guider, acheter avec le sourire, le bon mot, échanger des banalités, révéler d’où l’on vient et finir par se dire que l’on est vraiment mieux ici.
Car chez soi, il y a bien un marché, mais il est généralement trop petit, trop ancien, jamais bien situé, jamais le bon jour. Pas facile de se garer à proximité, pas le temps d’y aller, d’y flâner, de se laisser guider par les produits étalés devant nos yeux, ayant en main notre liste de course toute faite. Se dire que les produits y sont plus chers qu’au supermarché, que les vendeurs sont des voleurs, qui plus est insuffisamment aimables. Se persuader que finalement, leurs produits et ceux du supermarché se valent, pour se dédouaner qu’il est en fait bien plus pratique d’aller au centre commercial à toute heure, n’importe quel jour, mais dans quel intérêt ?
Car quel peut être l’avantage de se fondre dans la masse, dans cette ruche bruyante, sans ouverture ni lumière naturelle, où chacun tente de se frayer à tout prix un chemin, caddie en tête et à toute allure, zigzagant avec dérapage plus ou moins contrôlés entre d’autres caddies garés comme nos voitures dans les rues, n’importe comment, à contre sens, gênant l’accès aux rayons. Aucune saveur naturelle n’est exhalée, aucun conseil n’est prodigué, personne pour vous servir, tout juste pour vous orienter et encore, avec froideur, empressement et quasi-indifférence.
Un marché est au contraire un espace de convivialité, toujours ouvert sur l’extérieur, où le tumulte du temps ralenti quelque peu et où les sens ainsi se ravivent. Des vendeurs vous regardent, vous parlent, vous servent, vous conseillent, s’occupent de vous. Le lien humain s’établit. Une relation se rétablit. A l’intérieur, le monde semble s’humaniser, s’apaiser, se normaliser quelque peu. Les personnes se sourient, s’écoutent, échangent regards et bonnes paroles. Une qualité relationnelle prévaut sur la folie de l’urgence permanente et de l’efficacité prépondérante, générant stress, agressivité et donc conflits en tous genres.
Ainsi, sachons prendre le temps si nous voulons en gagner. Intéressons-nous à l’autre, captons leurs regards et parlons-nous, car voilà l’essentiel !
